A la surprise générale, le projet de loi du gouvernement sur les OGM a été rejeté par une majorité de 136 voix contre 135 à l'Assemblée ce mardi 13 mai 2008 à 18 heures.
Présent au moment du vote, j'ai évidemment ressenti une grande joie d'autant plus qu'en tant que député de l'opposition nous n'imaginons jamais "gagner" sur un vote. C'est suffisamment rare pour que l'on puisse parler de victoire historique. Une majorité de députés s'est tout simplement élevée con tre le passage en force du gouvernement et de l'UMP, qui, avec leur projet de loi, voulaient satisfaire les appétits des multinationales fabriquant des OGM.
Vote de bon sens et de résistance qui exprime la "révolte des petits"
Ce vote est un vote de bon sens contre un projet de loi qui autorisait les cultures OGM en plein champ et sans protéger la France et les Français du risque de dissémination et de contamination des cultures non OGM.
Ce vote est un vote de résistance aux pressions économiques et financières effectuées par les grands groupes de l'agrochimie. Ce vote est un vote d'affirmation de l'indépendance des députés par rapport aux consignes du gouvernement et de l'UMP qui ont tout fait pour empêcher un vrai débat.
Ce vote est aussi en quelque sorte la "révolte des petits": petits agriculteurs contre gros semenciers, mais aussi petits députés -qui connaissait André Chassaigne avant cet épisode? ( Nous, manants du Livradois-Forez! ndlr). Révolte d'une certaine base UMP qui en a sans doute aussi marre que nous de voir le Parlement piétiné semaine après semaine par le Président de la république et son gouvernement.
Ce vote est un vote de défense et de promotion d'une certaine agriculture française attachée aux productions de qualité et aux labels qui font son originalité et sa valeur économique en Europe et dans le monde.
Ce vote est un vote d'avenir pour le respect du principe de précaution, inscrit depuis cinq ans dans la Constitution de la République française. Je serais tenté de dire qu'enfin la gauche tout entière, mais aussi une partie de la droite, ont rejoint la position des Verts: ce n'est pas tous les jours tout de même…
Et maintenant? Un minable coup de force politique et juridique de l'UMP
A ce vote historique semble malheureusement succéder un minable coup de force politique et juridique.
Dès ce mercredi matin, 14 mai 2008, j'ai dénoncé ce coup de force anticonstitutionnel lors d'une conférence de presse à l'Assemblée nationale avec d'autres députés Verts, mais aussi Philippe Martin (PS) et André Chassaigne (PC).
Il est clair pour nous que ce vote contre le projet de loi OGM n'est pas un simple incident de procédure, comme essayent de le faire croire le gouvernement et l'UMP. Il est clair que la désaffection des députés UMP au moment d'un vote régulièrement inscrit à l'ordre du jour et archiprévisible, a une signification politique qui ne fait que confirmer les nombreuses oppositions au texte qui s'étaient déjà exprimées au sein de l'UMP. N'oublions pas que lors du vote en première lecture, le texte n'avait été adopté à l'Assemblée qu'avec dix voix de majorité alors que l'UMP en compte plus de soixante!
La décision du Premier ministre François Fillon de poursuivre l'examen du projet de loi comme si de rien n'était est donc d'abord un coup de force politique: jamais un gouvernement n'avait décidé de passer outre un vote majoritaire de l'Assemblée depuis le début de la Ve République, il y a cinquante ans.
C'est aussi un coup de force juridique. En effet, selon l'article 91 du règlement de l'Assemblée, le texte devrait être considéré comme rejeté. Seul un nouveau texte devrait pouvoir être réexaminé en reprenant la procédure législative depuis le début.
Contrairement à ce qu'affirme le gouvernement, la simple réunion d'une commission de sept députés et sept sénateurs, prévue à l'article 45 de la Constitution, ne peut pas s'appliquer dans pareil cas.
Nous avons malheureusement constaté que le Premier ministre et son ministre de l'Environnement persistaient dans cette voie, en réponse aux trois questions posées pendant la séance de questions d'actualité de ce mercredi 14 mai.
S'il faisait preuve d'un peu de sagesse et de hauteur -mais peut-être est-ce trop lui demander?- le président de la République, chargé par la Constitution de veiller au bon fonctionnement des institutions, aurait dû demander à son gouvernement de tout remettre à plat pour bâtir un nouveau projet de loi consensuel dans la droite ligne du Grenelle de l'environnement.
* En espagnol.
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